aux confins du Kairn…

Des textes et des mots pour dire le confinement…. et ses à côtés!!!

30 avril 2020

Flash Spécial : Chers téléspectateurs, les forces de l’ordre ont découvert le journal intime de Clarisse Vancouver décédée il y a 15 ans le 31 avril 2005. C’est peut-être l’occasion de dénouer cette affaire bien mystérieuse. L’affaire Vancouver est relancée après toutes ces années. En voici quelques extraits :

27 avril 2005 :
Cher journal, je t’écris pour te dire qu’aujourd’hui j’ai vécu le truc le plus horrible de ma vie. En rentrant du lycée avec Lucille, je m’attendais en guise d’accueil à des aboiements joyeux de mon chien Rocky mais rien aucun bruit. Je me suis inquiétée car la dernière fois qu’il n’a fait aucun bruit, il était très malade. J’ai posé mes affaires dans ma chambre et suis allée dans le salon pour voir si tout simplement il ne dormait pas. Mais quand je me suis avancée, j’ai eu un haut-le-coeur. Il était là flottant à un mètre du sol, secoué de convulsions. J’ai crié tellement fort que mes parents et mon frère ont accourus à toute vitesse. Rocky était un animal très affectueux, mignon et fidèle. Un chien parfait. Que lui arrivait-il ? Quand tout d’un coup, il est tombé. Je me souviendrai toute ma vie de ce moment où j’ai entendu son crâne percuté le sol. J’en suis traumatisée et, cette nuit,
j’en ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Je me suis remémorée tous les souvenirs que j’avais eu avec lui : son regard quand je m’était attardée sur lui au chenil et qu’il m’avait regardé avec tant de douceur et d’amour que j’ai su que ce serait lui. Son côté joueur et espiègle quand il prenait le journal de papa et qu’il le mâchouillait alors qu’il savait pertinemment qu’il n’en avait pas le droit. Je sortis de mon lit et suis allé chercher son doudou préféré puis j’ai fini par m’endormir.

28 avril 2005 :
Pour fêter l’anniversaire de mon frère Adam et remettre un peu de joie dans notre vie, maman m’avait proposé de faire un boeuf bourguignon. Comme c’est mon plat préféré, j’ai tout de suite accepté. Elle m’avait demandé d’aller chercher des carottes dans le potager alors je me suis vite dépêchée car il ne faisait pas chaud dehors. Quand je suis revenue dans la cuisine, elle était au milieu et brûlait.
Elle me criait qu’elle avait mal mais je ne la croyais pas et ça a été mon erreur. Au début, je croyais à un truc de farce et attrape puis quand elle a commencé à pleurer et crier que c’était réel et qu’elle allait mourir, j’ai tout de suite compris que ma mère était en proie à une combustion spontanée. J’avais dû faire un exposé sur des faits étranges et, avec mon binôme, nous avions choisi celui-ci donc, comment dire que j’étais calée sur le sujet. Mais le temps que je me remémore tous ces souvenirs datant du collège, ma mère était déjà morte. Après cette terrible découverte et devant le tas de cendres de ma mère, mon père n’a pas voulu me croire et nous en a voulu terriblement à moi et à Adam. Il disait que c’était juste une mise en scène ridicule pour que notre mère s’enfuie et le quitte. Tant bien que mal, j’essayais de le raisonner en lui disant que ce n’était pas parce qu’ils se disputaient beaucoup depuis un certain temps qu’elle serait partie.

29 avril 2005 :
Hier soir, je suis tombée de fatigue, épuisée par les larmes et le chagrin. Mais je ne m’attendais pas à ce que j’allais découvrir ce matin. Je prenais mon petit-déjeuner quand mon père a déboulé de l’escalier pour se ruer dans le jardin en hurlant. Je me suis précipité après lui pour voir pourquoi il criait si fort. Il a enlevé sa chemise et s’est mis à se gratter. Ses ongles s’enfonçaient si profondément dans sa chair qu’il saignait de partout. Il s’arrachait la peau par lambeaux. Puis s’écroula à mes pieds, mort. Le plus étonnant était que mon frère n’ait pas réagi à tous ses cris.
Inquiète, je me précipitais dans sa chambre. Quelle ne fut pas ma surprise ! Il était allongé sur son lit tel une momie desséchée. Il semblait avoir 200 ans et tout son lit était trempé comme si toute l’eau de son corps s’était échappée.
En seulement trois jours, je me retrouvais orpheline, sans famille.
Je me suis jurée de découvrir qui était derrière toutes ces morts inexpliquées et m’avait privé de tous les gens que j’aimais.
Mais que m’arrive-t-il ? Je ne me sens pas bien. De l’eau coule de mes oreilles, mon corps me gratte de toutes parts et me brûle. Mes jambes se soulèvent de terre sans que je ne puisse rien faire. A croire que je vis moi aussi tous ce qui a tué mes proches cette semaine. Je crois que je vais mourir sans savoir qui…

– Chers téléspectateurs, je reprends l’antenne pour conclure. Malheureusement s’arrête ici le journal de Clarisse et le mystère reste entier sur la mort des Vancouver. A-t-on affaire à un virus ? Un empoisonnement ? Mais que se passe-t-il ?

La voix du journaliste tremble, il blêmit :
– Je crois que je vais devoir rendre l’antenne, OH MON DIEU !

D’un coup la caméra tombe à terre, montrant le caméraman prendre ses jambes à son cou pour s’enfuir.
Le journaliste effrayé tombe à genoux et dans un dernier souffle s’adresse aux spectateurs :
– FUYEZ ! ET PRENEZ SOIN DE VOUS !

Il s’écroule alors tandis qu’on peut voir des flammes naître de son corps, de l’eau couler de ses oreilles tandis qu’il s’élève dans les airs en plein milieu du plateau du journal télévisé.
Saura-t-on un jour ce qui est arrivé sur la Terre ce jour du… mais que m’arrive-t-il ? Je brûle… ARRRGH

Zoé MOULUQUET, 12 ans

29 avril 2020

VIVRE LE BAISER LIBRE !

Tant de barrières sans mesures, moins de tendresse sans baisers, les moulins voudraient bien tourner, la meule avide grince en grippe. Bien des machines ont arrêté tous les baisers des employés, des industries, des ateliers, des temps comptés, des bénévoles, des sans-papiers, et des auto-entrepris, tous à la peine de poutines. Les statistiques fuient les courbes, les trésors craignent l’embolie en déficit des bouchées doubles, même les puits du grand or noir voudraient bien rouler des pelles dans les beaux SUV décapotables pour le printemps avant l’espoir.

Le cinéma perd son French Kiss sur l’écran blanc livré au noir, Rouge Baiser n’a plus l’affiche, ne la joue plus écarlate derrière le rideau de comédie et sur la piste si glacée, les patins en lourdes galoches glissent à la peine moins légers.

Baisers regrets, bisous perdus ne peuvent jamais se rattraper. Il faut relancer l’industrie, bâtir un plan, courir vers les sourires, les faire respirer, filer de l’oxygène, tourner la planche à billets doux, pour consommer plus, toujours plus de bisous. Et pas question d’un premier prix pour le baiser d’une mort libérale libérée au prix si fort, un maître mot, produire local dans l’atelier, pour faire des poutous trente-cinq heures, même à donner des heures sup pour consommer la bise fraîche à la bonne heure.

Pas d’inventeur, pas de recherche, ni de vaccin, sans aucun test, ni de chaudron pour un médoc, le brevet des poutines s’auto-protège. Promotion des baisers, des caresses sans limite sans date ni durée pour l’année et les autres. Ce qui est fait est toujours à refaire, qui n’a pas fait a toujours plus à faire. Tous en primeur et en couleurs comme les fruits ou les légumes, des baisers courts, des baisers longs, selon chacun que cela dure et livrés toujours frais. Une poutine ou un poutou, un vrai béco avec un cœur en prime pour ceux qui font pétition « VIVRE LE BAISER LIBRE ! ». Distanciation, baisers de pixels ou d’octets, de décibels ou de sons, bises sans contact, bisous sur vitre, lèvres 3D en impression, bisous en rouge, bisous en vert, attention collision au carrefour ! Bientôt, baisers fantômes sous les masques en gilet, rendez-vous aux ronds-points !

Révolution, promesse d’hier, le changement, c’est aujourd’hui et maintenant. Tous en patins au festival ! Des baisers, des poutines et les yeux qui s’allument et s’embrassent, les bras serrés, les verres qui tintent, les accolades. C’en est assez !

VIVE LE BAISER ! LOCAL ET ARTISAN ! LE VRAI !

Mireille MOULUQUET

23 avril 2020

En ces heures privilégiées pour le jardinage, Anita nous rappelle de ne pas oublier les vertus de l’ortie…

Après le long sommeil
Quand la nature se réveille …
Au bord des prés, aux bord des bois
Tu me trouveras.
Habillée de courts piquants
Je fais peur aux braves gens
Mais toi, petit malin,
Je le sais,  tu ne craints rien.
D’un geste habile tu me cueilleras
Et dans la marmite tu me jetteras.
Une courte cuisson me suffira
Et tu te régaleras
Oui … D’accord …
On ne le dirait pas!
Mais la meilleure, c’est bien moi!
                            L’Ortie

18 avril 2020

Pierre Cazenavette nous fait aussi partager sa création. Ci après son texte « le virus »

A un étudiant qui lui demandait:

– Vous y croyez, vous, à ce virus?

le philosophe répondit:

– C’est une pure invention des chinois. Ce n’est pas vrai, mais dans le doute… j’y crois. Ne serait-ce que pour m’en protéger!

L’étudiant rétorqua:

– Bien, moi je n’y crois pas, mais c’est vrai. Il existe puisqu’il tue.

– Vous pensez donc qu’il vous épargnera?

– Je pense que mon organisme n’est pas programmé pour l’héberger. D’ ailleurs, j’ai été testé: je ne suis pas porteur.

Depuis que les gouvernants avaient rendu le dépistage obligatoire sur l’ensemble de la planète, le virus faisait débat.

Les équipes médicales, victimes du diktat de rentabilité plombant toutes les structures hospitalières au monde, et donc en tous points sous-équipées, se limitèrent à informer oralement chaque patient testé des résultats du test. Seules les personnes testées positives furent priées de respecter le plus strict confinement. Y compris les porteurs sans symptômes, bien sûr.

Chacun ignorait donc de l’autre – visiblement en bonne santé- s’il était non contaminé ou porteur sain. Seules les personnes hospitalisées étaient considérées clairement porteuses du virus.

Certaines personnes, en effet, peu enclines à subir les contraintes du confinement, comme l’étudiant ci-dessus, se disaient non porteuses tout en l’étant!

D’autres, par contre, soucieuses de ne pas mettre en danger la santé de leurs proches, déclarèrent en toute loyauté être contaminées et  respectèrent les consignes de confinement. Mais très vite, circula sur les réseaux sociaux l’information selon laquelle ces personnes se disaient contaminées pour pouvoir rester chez elles tout en continuant d’être rémunérées…

Bref, un climat de suspicion généralisée contamina  la planète entière en même temps que le virus…

  Je ne comprends pas les gens qui pensent que celui qui affirme n’être pas porteur l’est forcément! Par exemple moi, je dis que je ne le suis pas, et ce n’est pas pour ça que je le suis, insista l’étudiant.

– Mais le nier est déjà un indice suspect, renchérit le philosophe.

– Non! Car que fait la personne quand elle a compris que les gens ne croient pas ceux qui disent l’être? Elle dit dans un premier temps qu’elle l’est pour faire croire qu’elle ne l’est pas!

– Diable. Alors dorénavant…

Le philosophe fut interrompu par le doyen de la Faculté faisant irruption dans l’amphithéâtre sous le regard incrédule des quelque cent soixante étudiants. Il s’empara du micro et déclara solennellement:

– Pardon pour cette brutale interruption. Je viens d’apprendre le décès du Président des Etats-Unis d’Europe, victime à son tour du virus. Un deuil de trois jours a été décrété à compter de midi pour toute l’Europe. L’université sera fermée pendant la durée du deuil.

Quarante- huit heures avant, le porte-parole de l’exécutif européen avait communiqué un bulletin de santé du Président , le déclarant non contaminé et en parfaite santé…


17 avril 2020

Merci Alexandrine pour ces notes d’espoir….

J’ai rêvé

J’ai rêvé qu’au petit matin le chant des oiseaux résonnait dans le lointain
J’ai rêvé que la Nature retrouvait sa juste place,
que l’arrogance de l’Homme un peu s’efface
J’ai rêvé qu’il retourne à l’intérieur
qu’il aille regarder ses peurs
et qu’il y trouve sa joie,
lui donne des ailes, la déploie.
J’ai rêvé les rires des enfants
libres comme leurs parents
qui prennent le temps de savourer ces doux moments de vérité.
J’ai rêvé l’envie d’oser vivre sa vie,
Sur la chaussée..des pissenlits
Le courage de tourner la page
Sous les pavés retrouver la plage..
Et puis j’ai ouvert les yeux,
En vrai c’était encore mieux,
Sur les glaciers le froid soufflait
Un nouveau vent de liberté,
Un nouveau Monde à inventer.🌍🌠🌈🤸🏿‍♀️


13 avril 2020

Annick, reine des plantes et des fleurs nous fait partager sa poésie, du fond de sa ruelle….

 

Renouveau

confiné.

Voyons comment chez moi Printemps se manifeste

Lorsque sévit dehors la minuscule peste….

Dans mon appartement qui est au deuxième étage

Dans une rue étroite, pas trop de paysage :

J’aperçois toutefois, depuis une fenêtre

La base du château et puis aussi peut-être

Si je m’étire un peu au bout de mon balcon

Un bout des Pyrénées et les derniers flocons

Qui couronnent de blanc les sommets et les pentes

J’ai beau froncer le nez pas moyen que je sente

Tout en bas du château, la forêt de lilas

Son océan de mauve est bien trop loin pour moi !

Ah, il y a aussi l’éclat neuf du soleil

Élevant chaque jour sa course dans le ciel

Et qui, le soir venu s’attarde en mon salon

Et fait de ma prison un univers tout blond.

De petits papillons s’égarent quelquefois

– Je les fais repartir sur le bout de mon doigt –

Et depuis plusieurs jours je reçois la visite

D’abeilles égarées qui se cognent à la vitre,

C’est la Reine sans doute qui les a dépêchées :

Au sommet du château, il y a un rucher.

Les appels des mésanges, je les ai entendus

Comme elles sont au nid on ne les perçoit plus

Lors leur a succédé le chant des tourterelles

En attendant, strident, le cri des hirondelles.

Il me manque des fleurs à l’horloge du temps

Pour que je réalise qu’il est là le printemps…

J’attendrai l’an prochain pour revoir  les violettes ,

Par bonheur mes amies qui sont un peu poètes

M’envoient via le mail photos de floraisons

M’apportant gentiment la nouvelle saison :

Pivoines rebondies penchées dessus la table

Dentelle empourprée des feuilles d’un érable

Abricotier en fleurs aux feuilles d’un vert très pâle

Cerisiers finissants pleurant tous leurs pétales

Chaises longues sorties, herbe grasse qui pousse

Primevères pointant au milieu de la mousse

Gros mur dont les rochers dégoulinent de thym

En belles vagues roses, les iris en satin

Et  au bord du ruisseau des années écoulées

Les merisiers en fleurs en neigeuses coulées.

Allez, assez rêvé de printemps virtuel,

Je ne peux pas voler comme les mouches à miel

Mais je peux farfouiller dans mes paquets de graines

Et parions ma foi, que dans quelques semaines

Le Printemps fleurira dans ma ruelle étroite

Comme un diable en couleurs surgi hors de sa boîte .   

Annick BALERI         


12 avril 2020

Petite

Douce petite, ne bouge pas

garde ta vie, tu comprendras

quand tu auras l’âge

En attendant, reste immobile

patiente un peu et reste sage.

Douce petite, ils l’ont tous dit

la bête arrive, elle est bien là

attendent gris, tapis dans l’ombre

de voir la bête, ont tout promis

mentent beaucoup les bras ballants.

Douce petite, ils me font pleurer

ils avaient su, ladres, ne savent plus

La bête est là, dévore les faibles

mais dans le doute et précautions

fortes, elles, plissent des masques.

Douce petite, quitte la ville

viens me rejoindre dans tes mots

dans tous mes champs et mes beaux gaves

la bête se cache, on la bataille

comme le loup chez les agneaux.

Douce petite, ne pleure pas

entre tes murs qui font la cage

comme l’oiseau, chante beaucoup

dessine-moi tout de ta colère

et sur la vie qui est trop belle.

Douce petite, apprends la vie

du grand soleil et des étoiles

qui ne parlent pas, ne disent rien

mais ils font tout pour qu’on les aime

du jour à la nuit, hier et demain.

Mireille Mouluquet


10 avril 2020

 

Bonjour amizamies du temps sans, du temps qui conte

Sans vous en vrai

Mais sent vous en vrai, en rêvaillance, en ressouvenir de penséepapillon, de nuages dragons.
Temps si présent de l’absence, si plein du manque de l’autre.

Avant hier, j’étais avec Mélusine, ma petite fille au prénom de fée. Nous étions au bout du chemin de derrière chez moi contemplant l’horizon de la mer argentée sous le soleil de printemps. Marée montante. Vague après vague, la mer avance puis recule, vivante, roulant les pierres inlassablement.

– Papy, raconte-moi l’histoire du sable…
Le temps d’un conte d’une terre qui roule dans la mémoire en écho d’un appel à Suzy Platiel, amie et grande dame du conte outil d’humanité.
Un conte pour se faire du bien.
Bien à vous, bien à nous
Fraternellement
Ludovic Souliman


 

4 avril 2020

Calme

 

L’horizon bleu face à lui-même

les pies jacassent avec bon train

les vaches ruminent au zénith

les pissenlits lâchent leurs akènes

Tout semble calme et rien ne change

Le bourg est vide, bitume lisse

la halle chasse ses teintes vives

rien ne salit l’asphalte gris

les invasives jaunissent les pierres

Tout est si calme et  la vie change

Le carillon, plus que ce bruit

sonne à l’église aux heures qui passent

lève les paupières des yeux lassés

derrière leurs vitres le nez collé

Tout est trop calme, la vie nous range

Le vieux Pasteur et ses vieux vers

ravivent les vies toutes en émoi

sortent les aiguilles, piquent les vieux draps

plissent des masques contre la peste

Tout n’est plus calme, la vie s’arrange

Une fois encore, tant de paroles

paroles pour contre paroles

qui parle trop ne fait plus rien

les petites mains, elles font du bien.

Rien n’est plus calme, la vie nous mange

Mireille MOULUQUET

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 3 avril 2020,

un média internet qui semble bien intéressant au regard d’articles tels que celui-ci :

Imaginer les gestes-barrières contre le retour à la production d’avant-crise

PHILOSOPHE ET SOCIOLOGUE

Si tout est arrêté, tout peut être remis en cause, infléchi, sélectionné, trié, interrompu pour de bon ou au contraire accéléré. L’inventaire annuel, c’est maintenant qu’il faut le faire. A la demande de bon sens : « Relançons le plus rapidement possible la production », il faut répondre par un cri : « Surtout pas ! ». La dernière des choses à faire serait de reprendre à l’identique tout ce que nous faisions avant.

Il y a peut-être quelque chose d’inconvenant à se projeter dans l’après-crise alors que le personnel de santé est, comme on dit, « sur le front », que des millions de gens perdent leur emploi et que beaucoup de familles endeuillées ne peuvent même pas enterrer leurs morts. Et pourtant, c’est bien maintenant qu’il faut se battre pour que la reprise économique, une fois la crise passée, ne ramène pas le même ancien régime climatique contre lequel nous essayions jusqu’ici, assez vainement, de lutter.En effet, la crise sanitaire est enchâssée dans ce qui n’est pas une crise – toujours passagère – mais une mutation écologique durable et irréversible. Si nous avons de bonne chance de « sortir » de la première, nous n’en avons aucune de « sortir » de la seconde. Les deux situations ne sont pas à la même échelle, mais il est très éclairant de les articuler l’une sur l’autre. En tout cas, ce serait dommage de ne pas se servir de la crise sanitaire pour découvrir d’autres moyens d’entrer dans la mutation écologique autrement qu’à l’aveugle.

La première leçon du coronavirus est aussi la plus stupéfiante : la preuve est faite, en effet, qu’il est possible, en quelques semaines, de suspendre partout dans le monde et au même moment, un système économique dont on nous disait jusqu’ici qu’il était impossible à ralentir ou à rediriger. À tous les arguments des écologiques sur l’infléchissement de nos modes de vie, on opposait toujours l’argument de la force irréversible du « train du progrès » que rien ne pouvait faire sortir de ses rails, « à cause », disait-on, « de la globalisation ». Or, c’est justement son caractère globalisé qui rend si fragile ce fameux développement, susceptible au contraire de freiner puis de s’arrêter d’un coup.

En effet, il n’y a pas que les multinationales ou les accords commerciaux ou internet ou les tour operators pour globaliser la planète : chaque entité de cette même planète possède une façon bien à elle d’accrocher ensemble les autres éléments qui composent, à un moment donné, le collectif. Cela est vrai du CO2 qui réchauffe l’atmosphère globale par sa diffusion dans l’air ; des oiseaux migrateurs qui transportent de nouvelles formes de grippe ; mais cela est vrai aussi, nous le réapprenons douloureusement, du coronavirus dont la capacité à relier « tous les humains » passe par le truchement apparemment inoffensif de nos divers crachotis. A globalisateur, globalisateur et demi : question de resocialiser des milliards d’humains, les microbes se posent un peu là !

Cette pause soudaine dans le système de production globalisée, il n’y a pas que les écologistes pour y voir une occasion formidable d’avancer leur programme d’atterrissage.

D’où cette découverte incroyable : il y avait bien dans le système économique mondial, caché de tous, un signal d’alarme rouge vif avec une bonne grosse poignée d’acier trempée que les chefs d’État, chacun à son tour, pouvaient tirer d’un coup pour stopper « le train du progrès » dans un grand crissement de freins. Si la demande de virer de bord à 90 degrés pour atterrir sur terre paraissait encore en janvier une douce illusion, elle devient beaucoup plus réaliste : tout automobiliste sait que pour avoir une chance de donner un grand coup de volant salvateur sans aller dans le décor, il vaut mieux avoir d’abord ralenti…

Malheureusement, cette pause soudaine dans le système de production globalisée, il n’y a pas que les écologistes pour y voir une occasion formidable d’avancer leur programme d’atterrissage. Les globalisateurs, ceux qui depuis le mitan du XXe siècle ont inventé l’idée de s’échapper des contraintes planétaires, eux aussi, y voient une chance formidable de rompre encore plus radicalement avec ce qui reste d’obstacles à leur fuite hors du monde. L’occasion est trop belle, pour eux, de se défaire du reste de l’État-providence, du filet de sécurité des plus pauvres, de ce qui demeure encore des réglementations contre la pollution, et, plus cyniquement, de se débarrasser de tous ces gens surnuméraires qui encombrent la planète[1].

N’oublions pas, en effet, que l’on doit faire l’hypothèse que ces globalisateurs sont conscients de la mutation écologique et que tous leurs efforts, depuis cinquante ans, consistent en même temps à nier l’importance du changement climatique, mais aussi à échapper à ses conséquences en constituant des bastions fortifiés de privilèges qui doivent rester inaccessibles à tous ceux qu’il va bien falloir laisser en plan. Le grand rêve moderniste du partage universel des « fruits du progrès », ils ne sont pas assez naïfs pour y croire, mais, ce qui est nouveau, ils sont assez francs pour ne même pas en donner l’illusion. Ce sont eux qui s’expriment chaque jour sur Fox News et qui gouvernent tous les États climato-sceptiques de la planète de Moscou à Brasilia et de New Delhi à Washington en passant par Londres.

Si tout est arrêté, tout peut être remis en cause.

Ce qui rend la situation actuelle tellement dangereuse, ce n’est pas seulement les morts qui s’accumulent chaque jour davantage, c’est la suspension générale d’un système économique qui donne donc à ceux qui veulent aller beaucoup plus loin dans la fuite hors du monde planétaire, une occasion merveilleuse de « tout remettre en cause ». Il ne faut pas oublier que ce qui rend les globalisateurs tellement dangereux, c’est qu’ils savent forcément qu’ils ont perdu, que le déni de la mutation climatique ne peut pas durer indéfiniment, qu’il n’y a plus aucune chance de réconcilier leur « développement » avec les diverses enveloppes de la planète dans laquelle il faudra bien finir par insérer l’économie. C’est ce qui les rend prêts à tout tenter pour extraire une dernière fois les conditions qui vont leur permettre de durer un peu plus longtemps et de se mettre à l’abri eux et leurs enfants. « L’arrêt de monde », ce coup de frein, cette pause imprévue, leur donne une occasion de fuir plus vite et plus loin qu’ils ne l’auraient jamais imaginé[2]. Les révolutionnaires, pour le moment, ce sont eux.

C’est là que nous devons agir. Si l’occasion s’ouvre à eux, elle s’ouvre à nous aussi. Si tout est arrêté, tout peut être remis en cause, infléchi, sélectionné, trié, interrompu pour de bon ou au contraire accéléré. L’inventaire annuel, c’est maintenant qu’il faut le faire. A la demande de bon sens : « Relançons le plus rapidement possible la production », il faut répondre par un cri : « Surtout pas ! ». La dernière des choses à faire serait de reprendre à l’identique tout ce que nous faisions avant.

Par exemple, l’autre jour, on présentait à la télévision un fleuriste hollandais, les larmes aux yeux, obligé de jeter des tonnes de tulipes prêtes à l’envoi qu’il ne pouvait plus expédier par avion dans le monde entier faute de client. On ne peut que le plaindre, bien sûr ; il est juste qu’il soit indemnisé. Mais ensuite la caméra reculait montrant que ses tulipes, il les fait pousser hors-sol sous lumière artificielle avant de les livrer aux avions cargo de Schiphol dans une pluie de kérosène ; de là, l’expression d’un doute : « Mais est-il bien utile de prolonger cette façon de produire et de vendre ce type de fleurs ? ».

Nous devenons d’efficaces interrupteurs de globalisation.

De fil en aiguille, si nous commençons, chacun pour notre compte, à poser de telles questions sur tous les aspects de notre système de production, nous devenons d’efficaces interrupteurs de globalisation – aussi efficaces, millions que nous sommes, que le fameux coronavirus dans sa façon bien à lui de globaliser la planète. Ce que le virus obtient par d’humbles crachotis de bouches en bouches – la suspension de l’économie mondiale –, nous commençons à l’imaginer par nos petits gestes insignifiants mis, eux aussi, bout à bout : à savoir la suspension du système de production. En nous posant ce genre de questions, chacun d’entre nous se met à imaginer des gestes barrières mais pas seulement contre le virus : contre chaque élément d’un mode de production dont nous ne souhaitons pas la reprise.

C’est qu’il ne s’agit plus de reprendre ou d’infléchir un système de production, mais de sortir de la production comme principe unique de rapport au monde. Il ne s’agit pas de révolution, mais de dissolution, pixel après pixel. Comme le montre Pierre Charbonnier, après cent ans de socialisme limité à la seule redistribution des bienfaits de l’économie, il serait peut-être temps d’inventer un socialisme qui conteste la production elle-même. C’est que l’injustice ne se limite pas à la seule redistribution des fruits du progrès, mais à la façon même de faire fructifier la planète. Ce qui ne veut pas dire décroître ou vivre d’amour ou d’eau fraîche, mais apprendre à sélectionner chaque segment de ce fameux système prétendument irréversible, de mettre en cause chacune des connections soi-disant indispensables, et d’éprouver de proche en proche ce qui est désirable et ce qui a cessé de l’être.

D’où l’importance capitale d’utiliser ce temps de confinement imposé pour décrire, d’abord chacun pour soi, puis en groupe, ce à quoi nous sommes attachés ; ce dont nous sommes prêts à nous libérer ; les chaînes que nous sommes prêts à reconstituer et celles que, par notre comportement, nous sommes décidés à interrompre[3]. Les globalisateurs, eux, semblent avoir une idée très précise de ce qu’ils veulent voir renaître après la reprise : la même chose en pire, industries pétrolières et bateaux de croisière géants en prime. C’est à nous de leur opposer un contre-inventaire. Si en un mois ou deux, des milliards d’humains sont capables, sur un coup de sifflet, d’apprendre la nouvelle « distance sociale », de s’éloigner pour être plus solidaires, de rester chez soi pour ne pas encombrer les hôpitaux, on imagine assez bien la puissance de transformation de ces nouveaux gestes-barrières dressés contre la reprise à l’identique, ou pire, contre un nouveau coup de butoir de ceux qui veulent échapper pour de bon à l’attraction terrestre.

Un outil pour aider au discernement

Comme il est toujours bon de lier un argument à des exercices pratiques, proposons aux lecteurs d’essayer de répondre à ce petit inventaire. Il sera d’autant plus utile qu’il portera sur une expérience personnelle directement vécue. Il ne s’agit pas seulement d’exprimer une opinion qui vous viendrait à l’esprit, mais de décrire une situation et peut-être de la prolonger par une petite enquête. C’est seulement par la suite, si vous vous donnez les moyens de combiner les réponses pour composer le paysage créé par la superposition des descriptions, que vous déboucherez sur une expression politique incarnée et concrète — mais pas avant.

Attention : ceci n’est pas un questionnaire, il ne s’agit pas d’un sondage. C’est une aide à l’auto-description*.

Il s’agit de faire la liste des activités dont vous vous sentez privés par la crise actuelle et qui vous donnent la sensation d’une atteinte à vos conditions essentielles de subsistance. Pour chaque activité, pouvez-vous indiquer si vous aimeriez que celles-ci reprennent à l’identique (comme avant), mieux, ou qu’elles ne reprennent pas du tout. Répondez aux questions suivantes :

Question 1 : Quelles sont les activités maintenant suspendues dont vous souhaiteriez qu’elles ne reprennent pas ?

Question 2 : Décrivez a) pourquoi cette activité vous apparaît nuisible/ superflue/ dangereuse/ incohérente ; b) en quoi sa disparition/ mise en veilleuse/ substitution rendrait d’autres activités que vous favorisez plus facile/ plus cohérente ? (Faire un paragraphe distinct pour chacune des réponses listées à la question 1.)

Question 3 : Quelles mesures préconisez-vous pour que les ouvriers/ employés/ agents/ entrepreneurs qui ne pourront plus continuer dans les activités que vous supprimez se voient faciliter la transition vers d’autres activités ?

Question 4 : Quelles sont les activités maintenant suspendues dont vous souhaiteriez qu’elles se développent/ reprennent ou celles qui devraient être inventées en remplacement ?

Question 5 : Décrivez a) pourquoi cette activité vous apparaît positive ; b) comment elle rend plus faciles/ harmonieuses/ cohérentes d’autres activités que vous favorisez ; et c) permettent de lutter contre celles que vous jugez défavorables ? (Faire un paragraphe distinct pour chacune des réponses listées à la question 4.)

Question 6 : Quelles mesures préconisez-vous pour aider les ouvriers/ employés/ agents/ entrepreneurs à acquérir les capacités/ moyens/ revenus/ instruments permettant la reprise/ le développement/ la création de cette activité ?

(Trouvez ensuite un moyen pour comparer votre description avec celles d’autres participants. La compilation puis la superposition des réponses devraient dessiner peu à peu un paysage composé de lignes de conflits, d’alliances, de controverses et d’oppositions.)

 


[1] Voir l’article sur les lobbyistes déchaînés aux Etats-Unis par Matt Stoller, « The coronavirus relief bill could turn into a corporate coup if we aren’t careful », The Guardian, 24.03.20.

[2] Danowski, Deborah, de Castro, Eduardo Viveiros, « L’arrêt de monde », in De l’univers clos au monde infini (textes réunis et présentés). Ed. Hache, Emilie. Paris, Editions Dehors, 2014. 221-339.

[3] L’auto-description reprend la procédure des nouveaux cahiers de doléance suggérés dans Bruno Latour, Où atterrir ? Comment s’orienter en politique. Paris, La Découverte, 2017 et développés depuis par le consortium Où atterrir http://www.bruno-latour.fr/fr/node/841.html

 

*L’auto-description reprend la procédure des nouveaux cahiers de doléance suggérés dans Bruno Latour, Où atterrir ? Comment s’orienter en politique. Paris, La Découverte, 2017 et développés depuis par un groupe d’artistes et de chercheurs.

 

https://aoc.media/opinion/2020/03/29/imaginer-les-gestes-barrieres-contre-le-retour-a-la-production-davant-crise/


 

Le 2 avril 2020, Ludovic Souliman revient….

Bonjour,

Nous sommes en vie. Nous sommes envie.
Entre conte et poème, errance et bohème, nous sommes nés pour vivre.
Le vent du printemps est fort, enfant sauvage, il tonitrue les arbres en fleurs et fait danser les cimes. L’essentiel est en ciel, là-haut, course de nuages en voyages. Ciel sans trace de quadrillage des chemins blanchâtres des avions.

Libres, les yeux découvrent d’autres chemins de sens.
Fuir la peur, en corps et en coeur, se remettre en jour, en joie, en faire.

En balade de temps de derrière chez moi, champs jaunes de colza, sur le chemin qui mène à la falaise, j’ai trouvé tout un trésor, une coquille de noix pour voguer par delà le temps, un lézard vert et trois grillons, un papillon blanc et mille nuages, des petits rien pour être riche de tant de tout.
J’étais avec Mélusine, ma petite fille. Nous avons joué à saute caillou avec, j’étais un singe aux poings d’acier et elle était Momotaro, l’enfant né d’une pêche et grandit en trois jours avec beaucoup d’amour, Mowgli et Baghera étaient avec nous sans oublier Peter Pan et toute la nombreuse bande des amis imaginaires qui grandit au fil des jours.
Le marteau frappe l’enclume et se forge la plume.

Ici, continuent nos rendez-vous en conte à usage du bonheur immédiat, l’arme heureux et le théorème du bonheur, rien que ça…
Bien à toi où que tu sois.
Force, paix et joie.
Mon coeur est mon âme
Ludovic

Le théorème du bonheur :  https://youtu.be/4R2FmmesMR4

L’arbre heureux :  https://youtu.be/93d1xDuJwVg


Le 31/03/2020

Parce que le confinement éloigne parfois les coeurs

A mon aimé d’Occitanie

Tu es dans les forêts d’Occitanie Et moi, confinée à Paris, Angoissée de ce silence, de ce danger invisible qui guette notre amour si imprévisible. Isolé en ces montagnes que tu défies avec ardeur sans réseau, sans boîte aux lettres et sans livreur, crois-tu, ma tendresse, mon sourire, mon désir que sans t’offrir mes mots, je te laisserai périr ? Comment pouvions-nous imaginer, déambulant En ces espaces mythiques Champs Elysées, Invalides, République Musées, cafés et restaurants Que nos mains, nos baisers, nos ébats Portaient en eux, leur dernière fois ? Te lèves tu, encore la nuit , pour remettre du bois ? Réchauffes tu mon corps par ces jouissantes caresses afin que je n’ai pas froid ? Que cette grange me parut somptueuse en ces jours de découverte de notre désir. Les crocus sauvages poussent déjà les dernières neiges Et le soleil brûlera cet Effroyable. Tu viendras, je le sais, et nous irons à Ordesa et à la féria de la primavera.

Nous chanterons, nous danserons et nous ferons l’amour

Léa


Cergy, le 30 mars 2020

Monsieur le Président,

« Je vous fais une lettre/ Que vous lirez peut-être/ Si vous avez le temps ». À vous qui êtes féru de littérature, cette entrée en matière évoque sans doute quelque chose. C’est le début de la chanson de Boris Vian Le déserteur, écrite en 1954, entre la guerre d’Indochine et celle d’Algérie. Aujourd’hui, quoique vous le proclamiez, nous ne sommes pas en guerre, l’ennemi ici n’est pas humain, pas notre semblable, il n’a ni pensée ni volonté de nuire, ignore les frontières et les différences sociales, se reproduit à l’aveugle en sautant d’un individu à un autre. Les armes, puisque vous tenez à ce lexique guerrier, ce sont les lits d’hôpital, les respirateurs, les masques et les tests, c’est le nombre de médecins, de scientifiques, de soignants. Or, depuis que vous dirigez la France, vous êtes resté sourd aux cris d’alarme du monde de la santé et  ce qu’on pouvait lire sur la  banderole  d’une manif  en novembre dernier –L’état compte ses sous, on comptera les morts – résonne tragiquement aujourd’hui. Mais vous avez préféré écouter ceux qui prônent le désengagement de l’Etat, préconisant l’optimisation des ressources, la régulation des flux,  tout ce jargon technocratique dépourvu de  chair qui noie le poisson de la réalité. Mais regardez, ce sont les services publics qui, en ce moment, assurent majoritairement le fonctionnement du pays :  les hôpitaux, l’Education nationale et ses milliers de professeurs, d’instituteurs si mal payés, EDF, la Poste, le métro et la SNCF. Et ceux dont, naguère, vous avez dit qu’ils n’étaient rien, sont maintenant tout, eux qui continuent de vider les poubelles, de taper les produits aux caisses, de  livrer des pizzas, de garantir  cette vie aussi indispensable que l’intellectuelle,  la vie matérielle.

Choix étrange que le mot « résilience », signifiant reconstruction après un traumatisme. Nous n’en sommes pas  là. Prenez garde, Monsieur le Président, aux effets de ce temps de confinement, de bouleversement du cours des choses. C’est un temps propice aux remises en cause. Un temps   pour désirer un nouveau monde. Pas le vôtre ! Pas celui où les décideurs et financiers reprennent  déjà  sans pudeur l’antienne du « travailler plus », jusqu’à 60 heures par semaine. Nous sommes nombreux à ne plus vouloir d’un monde  dont l’épidémie révèle les inégalités criantes, Nombreux à vouloir au contraire un monde  où les besoins essentiels, se nourrir sainement, se soigner, se loger, s’éduquer, se cultiver, soient garantis à tous, un monde dont les solidarités actuelles montrent, justement, la possibilité. Sachez, Monsieur le Président, que nous ne laisserons plus nous voler notre vie,  nous n’avons qu’elle, et  « rien ne vaut la vie » –  chanson, encore, d’Alain  Souchon. Ni bâillonner durablement nos libertés démocratiques, aujourd’hui restreintes, liberté qui  permet à ma lettre – contrairement à celle de Boris Vian, interdite de radio – d’être lue ce matin sur les ondes d’une radio nationale.

Annie Ernaux

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Le 29/03/2020

Horizon

Horizon, une ligne, un point de fuite / mon corps a l’envie de grimper / voir loin / très loin / ligne découpée ou arrondie, jamais droite / qui sait vraiment ? on ne sait plus / cette frange au lointain en dos vouté, en points perdus / en flou, en incertain, en éternel / ce tracé flou et indécis des toits et des clochers / ce flou ébouriffé et rond des chênes, ce flou long des frênes, des flèches des sapins /  ce flou des champ bruns / ce flou des labours qui rayent les collines / ce flou des sillons féconds en attente de mille germes / ce flou où les crêtes avalent les sommets, les gaves leurs vallées / ce flou brumeux sans ruisseau et sans fleuve  / ce flou en miroir des rivières et des fleuves / ce flou sans pic, sans creux , sans relief / sans noir, ni blanc, quelque argent en couleurs de voiles blêmes / ce trouble flou / la terre devient plaine / en traits, en bandes, en diagonales et damiers / ce vague flou en ombres douces mangées par les reflets / ce flou flottant de la matière / apaisée /.

Horizon sans trace de corps d’hommes / sans mouvement, sans guerre et sans combat / ces flous fondus des marques du labeur / millénaire / Horizon en quatre coins / les yeux se perdent et cherchent / matière ocre verte en ivresse sur un radeau qui danse, tangue, oscille, bouge immobile / immobile / le silence attendu,  écouté / surprenant / inconnu / sans bruit, sans son, sans voix, sans cri / sans hommes / invisibles.

Horizon sans horizon sur les champs en océan de terre / les vies dans l’air perdues en traits dans les bleus vers les gris / petit point noir, une virgule sombre / un trait blanc, un vaisseau / dans le ciel, un trait blanc /. Le bleu du ciel devient ma mer / mer nue / les vagues en traits si souples sans cadences, sans furies / sans litanies des chants humains / je regarde de la berge de ce que l’on sait vers l’inconnu que l’on sent / mer infinie / presque mobile / les nues / la terre simple / le ciel mer nu / peau contre peau dans tout leurs flous / infinis, indolents, solubles, assoupis / sans vie d’hommes / invisibles / le mot vert se fond au bleu intouché / sans hommes /.

Mireille MOULUQUET


29/03/2020, reçue ce matin,

La lettre de Ludovic SOULIMAN, conteur du tout, du rien, de partout….. Qu’il fait du bien!!!

Bonjour,
Jour faisant, jours fait temps, jours fait vie.
Nous, en chemins de je en quarantaine, eu jeu de mots, en jeu de sens.
Enjeu des sens. En quête de vérité.
La parole se répète à l’infini sur la machine infernale du grand enfumage de la fabrique des angoisses, le monologue du pouvoir monopolise la parole pour éviter la réflexion et l’urgence de remise en cause d’un système responsable en grande partie de la situation actuelle…

Ici, n’est pas l’endroit du commentaire, ni de l’opinion. D’autres lieux existent pour cela.

Ici est un chemin maladroit en quête de lumière et d’humanité.
Ici, les contes à usage du bonheur immédiat invite l’autre, amie et ami de conte, à partir en histoire, à se retrouver là dans ce
possible impossible, dans ce mensonge en quête de vérité. Rien n’est plus précieux que la vérité.
A compte goutte, à goûte contes…
Une minute d’aube en promenade de chants d’oiseaux et le conte de l’Arbre et le roi.
Bonne vie.
Mon coeur est mon âme.

https://www.youtube.com/watch?v=KM6TbVExBJw

Fraternellement
Ludovic Souliman

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Un texte de Fred VARGAS écrit en 2008 et lu par Charlotte GAINSBOURG…. Nous y voilà… pour de vrai….

 


Sarah Roubato écrit depuis longtemps, partage depuis qu’elle écrit, interpelle depuis qu’elle partage… Elle a écrit plusieurs ouvrages mais on peut la suivre sur son site https://www.sarahroubato.com/. Elle partage avec nous ce nouveau site, http://www.lettresdunegeneration.com/, lettres des 15-25 ANS, A suivre de près, compléter et faire suivre…
Bonne découverte…

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un lien vers un blog de textes chouettes!
https://bleufushia.wordpress.com/

Et quelques lectures à écouter les yeux fermés cliquer ici

 

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Une ode à l’innocence de la vie :

C’était en mars 2020
Les rues étaient vides, les magasins fermés, les gens ne pouvaient plus sortir
Mais le printemps ne savait pas, et les fleurs ont commencé à fleurir, le soleil brillait, les oiseaux chantaient, les hirondelles allaient bientôt arriver, le ciel était bleu, le matin arrivait pus tôt
C’était en mars 2020
Les jeunes devaient étudier en ligne, et trouver des occupations à la maison, les gens ne pouvaient plus faire de shopping, ni aller chez le coiffeur. Bientôt il n’y aurait plus de place dans les hôpitaux, et les gens continuaient de tomber malades.
Mais le printemps ne savait pas, le temps d’aller au jardin arrivait, l’herbe verdissait
C’était en mars 2020
Les gens ont été mis en confinement pour protéger les grands-parents, familles et enfants. Plus de réunion ni repas, de fête en famille. La peur est devenue réelle et les jours se ressemblaient.
Mais le printemps ne savait pas, les pommiers, cerisiers et autres arbres ont fleuri, les feuilles ont poussé
Les gens ont commencé à lire, jouer en famille, apprendre une langue, ils chantaient sur leur balcon en invitant les voisins à faire de même, ils ont appris à être solidaires et se sont concentrés sur d’autres valeurs.
les gens ont réalisé l’importance de la santé, la souffrance, de ce monde qui s’était arrêté, de l’économie qui a dégringolé
Mais le printemps ne savait pas. les fleurs ont laissé leur place aux fruits, les oiseaux ont fait leur nid, les hirondelles étaient arrivées

Puis le jour de la libération est arrivé, les gens l’ont appris à la télé. le virus avait perdu, les gens sont descendus dans la rue, ils chantaient, pleuraient, embrassaient leurs voisins, sans masques ni gants

Et c’est là que l’été est arrivé, parce que le printemps ne savait pas. Il a continué à être là malgré tout, malgré le virus, la peur et la mort. Parce que le printemps ne savait pas, il a appris aux gens le pouvoir de la vie

Tout va bien se passer, restez chez vous, protégez-vous, et vous profiterez de la vie.

Lisez ceci, répandez le et restez amoureux

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Quand les confinis parlent aux confinés :

https://youtu.be/B_MDz-4Znjo


 

Pas de danse

On oublie la fête
le pavé humide
presque trop lucide
mon pas s’y reflète

Le froid m’ankylose
la beauté nocturne
quand s’en vient la lune
se pare de rose

Et dès qu’elle se pose
ronde solitaire
plus que la misère
le sombre s’impose

On oublie la fête
les étoiles en joie
magnifique émoi
et tout se déleste

Fatigue tristesse
je sens apparaître
des demains mal être
et pour qu’ils ne naissent

Fière solitude
devant toi je dresse
commune caresse
mienne lassitude

Étourdie ignare
j’abandonne mes pas
et danse vos trépas
sur la nuit sans fard

On oublie la fête
l’instant qui bascule
l’infini calcul
où tous se détestent

On oublie la fête
l’instant qui bouscule
l’homme tentacule
a perdu la tête

Eve sur une idée de Rose


Salut à vous !

De nos chez nous respectifs, nous avons bricolé un

« À vous la Terre » en vidéo pour les enfants.

www.lesogres.com https://o.ello.co/https://www.lesogres.com

Salut à vous ! De nos chez nous - auxconfinsdukairn2020 | ello
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